La Réforme Ferroviaire Majeure de la Deutsche Bahn : Un Renouveau Attendu

La Deutsche Bahn (DB) a récemment annoncé l’une des réformes ferroviaires les plus ambitieuses d’Allemagne depuis trois décennies, suscitant des réactions variées. Alors que certains applaudissent cette initiative, d’autres expriment des inquiétudes quant à son efficacité et à ses implications. Dans cet article, nous explorons en détail la réforme DB InfraGo, ses objectifs, ses défis et ses implications pour le réseau ferroviaire allemand.

Une Situation Préoccupante

La Deutsche Bahn fait face à plusieurs problèmes majeurs qui ont conduit à la nécessité de cette réforme. L’un des problèmes les plus criants est la ponctualité insuffisante des trains. En 2023, seulement 64 % des trains ICE et IC sont arrivés à destination à l’heure, ce qui est en deçà des normes déjà faibles de l’année précédente. Cette situation est principalement attribuée à l’infrastructure ferroviaire défaillante, qui a été négligée pendant de nombreuses années.

Le réseau de voies ferrées allemandes a été qualifié de « trop vieux, trop sujet aux pannes et souvent au-delà de sa capacité » par Richard Lutz, PDG de la DB. Les retards et les annulations de trains sont devenus monnaie courante, ce qui a suscité la frustration des passagers et des opérateurs ferroviaires concurrents.

DB InfraGo : La Clé de la Réforme

La DB InfraGo, créée le 1er janvier, jouera un rôle central dans la mise en œuvre de cette réforme majeure. Elle est née de la fusion des filiales de la DB, DB Netz, responsable du réseau de voies ferrées, et DB Station&Service, qui gère les gares. Avec plus de 60 000 employés, elle sera chargée de la gestion des quelque 33 400 kilomètres de voies ferrées et de 5 400 gares en Allemagne.

L’une de ses missions principales consistera en la rénovation complète de 40 corridors à haute performance. D’ici 2030, plus de 4 000 kilomètres de voies ferrées très sollicitées seront modernisés de manière approfondie. Au lieu des réparations partielles habituelles, cette réforme implique la modernisation simultanée des voies, des aiguillages, des caténaires, des signaux et même des gares lors de fermetures temporaires, pour garantir une amélioration durable de l’ensemble du réseau.

Le projet pilote de cette initiative est la ligne Riedbahn, un tronçon notoire de 70 kilomètres entre Francfort et Mannheim. Cette ligne sera fermée pendant cinq mois au second semestre 2024 pour les travaux de modernisation, avec des préparatifs en cours depuis un certain temps.

Outre la modernisation des corridors à haute performance, la DB InfraGo prévoit également la mise à niveau progressive du reste du réseau, la numérisation de plusieurs tronçons et l’augmentation de la capacité du réseau existant grâce à de nouvelles opportunités de dépassement et à des signaux supplémentaires.

Investissements Importants

Le ministre allemand des Transports, Volker Wissing, a souligné la nécessité d’investir entre 40 et 45 milliards d’euros d’ici 2027 pour la réalisation de ces projets ambitieux. Parmi ces fonds, 31,5 milliards d’euros sont déjà assurés, dont 11,5 milliards d’euros provenant du budget central de l’État et 20 milliards d’euros sous forme de fonds propres.

L’augmentation du capital propre est une mesure relativement récente, résultant de l’ajustement des plans financiers suite à une décision de la Cour constitutionnelle de Karlsruhe en novembre. Cette décision a réduit les fonds disponibles du Fonds pour la transformation et le climat, ce qui a incité le gouvernement à opter pour l’augmentation du capital propre. Cette démarche présente des avantages pour l’État, car elle ne compte pas dans les limites de la règle de l’équilibre budgétaire.

Des Inquiétudes et des Critiques

Cependant, malgré l’enthousiasme pour cette réforme, certaines voix s’élèvent pour exprimer des préoccupations importantes. Les associations professionnelles du secteur ferroviaire et les politiciens de l’opposition remettent en question le modèle DB InfraGo.

L’association Mofair, qui représente les opérateurs ferroviaires privés, a vivement critiqué la réforme, affirmant que peu de choses changeraient réellement, à l’exception du nom. L’organisation déplore notamment le manque de séparation financière et organisationnelle entre la DB InfraGo et le reste du groupe DB. Contrairement à l’accord conclu dans le contrat de coalition, selon lequel les bénéfices provenant de l’exploitation de l’infrastructure seraient réinvestis dans la DB InfraGo, ils continueront d’être versés au groupe DB. De plus, la DB maintiendra le contrôle sur cette nouvelle entité, plutôt que de la laisser sous le contrôle de l’État.

Mofair s’oppose également au financement d’une partie importante des investissements par le biais de l’augmentation du capital propre, ce qui, selon eux, limite la capacité de contrôle de l’État et crée des distorsions potentielles de la concurrence en faveur des opérateurs publics. Enfin, ils critiquent l’augmentation substantielle des tarifs d’utilisation des voies ferrées dès le début de l’activité de la DB InfraGo, sans prendre en compte la qualité médiocre de l’infrastructure, comme en témoignent les faibles taux de ponctualité.

Conclusion

La réforme majeure de la Deutsche Bahn, avec la création de DB InfraGo, représente une étape cruciale pour améliorer l’infrastructure ferroviaire allemande et restaurer la confiance des passagers. Cependant, elle est également sujette à des critiques et à des inquiétudes quant à son efficacité et à son impact sur les opérateurs privés. Le succès de cette réforme dépendra de la capacité de la DB InfraGo à moderniser efficacement le réseau et à répondre aux besoins croissants de la population allemande en matière de transport ferroviaire.

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