Tunisie : le nouveau partenariat migratoire UE-Tunisie sous le feu des critiques

Contexte : des centaines de migrants subsahariens expulsés et abandonnés dans le désert

Alors que la Tunisie vient d’expulser et d’abandonner en plein désert des centaines de migrants subsahariens sans eau ni nourriture, l’Union européenne a conclu le 17 juillet 2023 un accord controversé avec Tunis pour “lutter contre l’immigration irrégulière”.

Inquiète de la hausse des arrivées de migrants en Italie (+133% par rapport au premier semestre 2022), l’UE octroie 105 millions d’euros à la Tunisie pour renforcer le contrôle de ses frontières maritimes et terrestres. L’accord prévoit des livraisons d’équipements tels que des bateaux, des radars mobiles et des véhicules, ainsi qu’une coopération accrue contre les réseaux de passeurs.

Pourtant, à quelques centaines de kilomètres du sommet UE-Tunisie, des migrants subsahariens errent toujours dans des zones reculées près des frontières algérienne et libyenne. Suite à des affrontements ayant fait un mort début juillet à Sfax, la police tunisienne a déporté et abandonné des centaines de migrants hommes, femmes et enfants. Au moins 15 personnes sont mortes lors de cette opération.

Un accord controversé en pleine dérive autoritaire

Cet accord intervient alors que le président tunisien Kaïs Saïed mène une dérive autoritaire, avec une répression accrue contre ses opposants politiques et la société civile. Depuis sa prise de pouvoir en juillet 2021, Kaïs Saïed concentre tous les pouvoirs et gouverne par décrets.

L’UE ferme les yeux sur ces violations des droits humains et de l’Etat de droit en Tunisie, en échange du rôle de la Tunisie dans le contrôle migratoire aux frontières de l’Europe.

Depuis plusieurs années, l’UE externalise le contrôle de ses frontières à des pays peu regardants sur les droits humains, comme la Turquie ou la Libye où des abus graves sur les migrants ont été documentés par des ONG et organismes internationaux.

Des critiques de la part d’eurodéputés et d’ONG

Des eurodéputés et des ONG ont vivement dénoncé la complaisance de l’UE vis-à-vis des abus commis par la Tunisie. Ce soutien financier pourrait rendre l’UE “complice” des expulsions collectives illégales et des mauvais traitements infligés aux migrants par les forces de sécurité tunisiennes, selon Human Rights Watch.

Malgré ces critiques, l’UE entend désormais négocier des accords similaires avec d’autres pays du pourtour méditerranéen comme le Maroc et l’Egypte. L’objectif est de sous-traiter toujours plus loin le contrôle frontalier, en l’externalisant à des pays tiers.

Atteinte aux droits humains et à la mobilité

Pour des militants tunisiens des droits humains, cet accord acte “la soumission” aux exigences sécuritaires européennes. Il “confisque le droit à la mobilité” des migrants et “facilite la traite des êtres humains”.

L’accord renforce le rôle de garde-frontière externalisé de la Tunisie pour le compte de l’UE, qui repousse toujours plus loin les migrants qu’elle refuse sur son territoire. Il bafoue les droits fondamentaux des personnes migrantes.

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