La diplomatie turque s’apaise après des années de tensions

Une nouvelle orientation conciliante

La Turquie, dont les relations tumultueuses avec l’Union européenne alternent entre hauts et bas depuis son adhésion au Conseil de l’Europe en 1949, s’est résolue depuis deux ans à adopter une politique étrangère plus conciliante avec ses partenaires et voisins. Le régime de Recep Tayyip Erdogan, arrivé au pouvoir en 2003, et dont la diplomatie abrasive des dernières années semblait avoir pour objectif de se mettre à dos un maximum d’alliés occidentaux, opère un net infléchissement.

Cette prudente réorientation s’explique par plusieurs facteurs. D’une part, la Turquie a besoin de capitaux occidentaux pour financer son important déficit commercial, creusé par une inflation galopante ces dernières années. D’autre part, en tant que membre de l’OTAN depuis 1952, elle ne peut se permettre d’entretenir des relations exécrables avec ses alliés militaires, faute d’alternative crédible à cette alliance stratégique. Les États-Unis, dont la Turquie abrite plusieurs bases militaires, ne manquent d’ailleurs pas de le lui rappeler occasionnellement.

La guerre en Ukraine, un tournant décisif

La guerre en Ukraine, déclenchée en février 2022 par l’invasion russe, a marqué un tournant décisif. La Turquie s’est imposée comme le seul médiateur acceptable à la fois par Kiev et Moscou dans ce conflit. Une position ambigüe, qui inquiète les pays de l’UE, mais indispensable pour favoriser le dialogue entre les belligérants.

Ainsi, la Turquie a activement parrainé l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes, conclu en juillet 2022 à Istanbul, même si elle permet aussi discrètement à la Russie, frappée par des sanctions occidentales, de continuer à exporter certains produits.

Toujours est-il que le président Erdogan a levé son veto historique à l’entrée de la Suède et de la Finlande dans l’OTAN lors du sommet de Vilnius en juillet 2022, en échange d’une relance des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE, au point mort depuis 2018. Les Européens, sans envisager sérieusement cette adhésion, se disent prêts à discuter de certains sujets concrets comme l’union douanière ou le régime des visas.

Des tensions persistantes malgré des signaux positifs

Malgré ces signaux positifs, la Turquie garde des moyens de pression, notamment sur sa gestion des près de 4 millions de réfugiés syriens qu’elle accueille et qu’elle menace régulièrement de laisser repartir vers l’Europe. Ses coups de menton restent aussi fréquents envers la France, critiquée pour sa politique envers les musulmans, ou la Grèce, avec qui les contentieux territoriaux perdurent.

La recomposition géopolitique au Moyen-Orient depuis le Printemps arabe de 2011 l’oblige aussi à ajuster sa stratégie. Erdogan a dû pragmatiquement reconnaître que Bachar Al-Assad, qu’il qualifiait autrefois de dictateur, resterait au pouvoir en Syrie, et une normalisation est en cours avec l’Arabie saoudite et Israël. Mais les tensions perdurent avec l’Iran, son concurrent régional.

Conclusion

Bien que perfectible, l’inflexion de la diplomatie turque ces dernières années témoigne d’une volonté d’apaisement avec ses partenaires, dictée par des considérations économiques et géostratégiques. Mais le tempérament affirmé d’Erdogan et les nombreux différends historiques font que des points de friction subsistent régulièrement avec l’UE et certains voisins. Cette relation complexe nécessitera encore des efforts de part et d’autre pour une normalisation sur le long terme.

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