Avec au moins 40 morts, la saison actuelle de mousson s’avère déjà particulièrement dangereuse en Corée du Sud, où des pluies sont encore prévues.
Quatre corps supplémentaires ont été retrouvés dans un passage sous autoroute inondé en Corée du Sud, ont indiqué lundi des responsables, portant à au moins 40 morts le bilan des récentes inondations. Le pays est frappé par d’intenses précipitations liées à la mousson qui a balayé la nation ces derniers jours, ensevelissant des maisons, abattant des arbres, annulant des vols et des trains, et coupant l’électricité à des dizaines de milliers de résidents.
Lundi soir, les inondations et glissements de terrain avaient également blessé au moins 34 personnes, selon les pompiers locaux ; neuf personnes sont portées disparues. Au moins 15 véhicules se trouvaient dans le passage souterrain à Cheongju, une ville située à environ 110 km au sud de Séoul, lorsqu’il a été inondé vers 8h30 samedi, selon le service d’incendie local. Cinq personnes qui s’y trouvaient vraisemblablement sont toujours portées disparues ; on ne sait pas combien de personnes ont pu s’en extraire. Près de 400 sauveteurs avaient été envoyés sur les lieux.
Des précipitations record
Plus de 30 pouces de pluie sont tombés dans tout le pays samedi, selon l’agence météorologique nationale. De telles quantités d’eau en si peu de temps sont tout à fait exceptionnelles pour cette région et posent d’importants défis aux autorités pour gérer les inondations et glissements de terrain. Ces précipitations record s’expliquent par la conjonction de la mousson estivale habituelle et d’un épisode météorologique particulièrement intense.
Une topographie propice aux glissements de terrain
De fortes pluies de mousson sont typiques en été en Corée du Sud, et sa topographie montagneuse la rend vulnérable aux glissements de terrain. Le relief accidenté favorise en effet la saturation des sols lors de fortes pluies. L’eau s’infiltre moins bien dans les pentes, entraînant le détachement de blocs de terre qui dévalent jusqu’aux vallées. Les bassins versants pentus se retrouvent ainsi rapidement saturés.
Un nombre de victimes anormalement élevé
Mais le nombre de victimes signalées jusqu’à présent cette saison est plus élevé que d’habitude. « Le nombre de morts est étonnamment élevé », a déclaré Cheong Tae Sung, un expert des inondations à l’Institut national coréen de recherche sur la gestion des catastrophes, dans un entretien. Il y a en effet quelques raisons possibles à cela.
L’une est que ces dernières années, les précipitations ont eu tendance à se concentrer dans les zones urbaines, près des grandes villes de Busan et de Séoul. Cette fois, une grande partie des récentes pluies sont tombées dans les zones rurales des provinces de Chungcheong et de Jeolla, qui peuvent être plus vulnérables en partie parce qu’elles sont plus difficiles à surveiller et à atteindre. Les populations y sont donc moins préparées et les secours plus longs à arriver.
Le rôle du changement climatique
M. Cheong a ajouté que, comme le changement climatique réchauffe la Corée du Sud, la pluie semble également tomber en rafales plus intenses plutôt que lentement sur une plus longue période. Ce changement a rendu la préparation aux inondations plus difficile. Les modèles météorologiques habituels se retrouvent pris en défaut et les prévisions sont moins fiables pour anticiper l’intensité des précipitations. Le réchauffement global pourrait amplifier le phénomène de mousson et la fréquence des événements extrêmes.
Un bilan qui s’alourdit
Au moins cinq des personnes tuées vendredi et samedi sont mortes à l’intérieur de maisons et de bâtiments qui s’étaient effondrés dans des glissements de terrain, et une personne a été ensevelie sous la terre et le sable, a indiqué le ministère de l’Intérieur dans un communiqué. Une autre victime est décédée après l’effondrement d’une route.
Plusieurs barrages dans la partie centrale du pays ont commencé samedi à libérer de manière contrôlée de l’eau, et l’un a débordé, provoquant l’évacuation de milliers de résidents vivant en aval. Un train de passagers a déraillé vendredi soir lorsque du sol est entré sur une voie ferrée, bien qu’aucune victime n’ait été signalée. Les dégâts matériels viennent cependant aggraver la situation.
Face à cette catastrophe, le gouvernement sud-coréen est en alerte ce mois-ci, avec de hauts responsables insistant sur l’importance de la sécurité pendant la saison de la mousson. Ce sentiment d’urgence s’est renforcé au cours du week-end, à mesure que les informations sur les morts et les blessés affluaient.
Une mobilisation générale
« Même s’il existe une petite possibilité de danger, la surréaction est le principe de cette réponse aux fortes pluies », a déclaré le Premier ministre Han Duck-soo samedi, mobilisant l’armée pour se joindre aux efforts de secours. Le président Yoon Suk Yeol a répété ses appels à une « réponse totale » du gouvernement. L’ampleur de la catastrophe impose une coordination de tous les services de l’Etat et une solidarité nationale pour venir en aide aux sinistrés.
Une mousson aux effets dévastateurs
La saison de la mousson en Corée du Sud commence généralement en juin et se termine début août. Le reste de l’année est principalement sec et ensoleillé, et le printemps présente un risque d’incendies de forêt. Mais durant l’été, la mousson apporte des pluies torrentielles qui peuvent avoir des effets dévastateurs.
Le pays a connu de lourds bilans dans le passé et a accepté en 1984 une aide humanitaire de la Corée du Nord. Plus récemment, le nombre de morts liées aux inondations chaque année se chiffrait à un seul chiffre, sauf en 2011, 2020 et 2022.
En août 2021, certaines des pluies les plus importantes depuis des décennies ont entraîné la mort d’au moins 14 personnes dans tout le pays. En 2020, des semaines de pluies intermittentes ont provoqué des inondations et des glissements de terrain dans tout le pays, faisant 48 morts. En 2011, plus de 70 personnes sont mortes, dont 17 tuées lorsque des coulées de boue se sont abattues sur des immeubles résidentiels dans le sud de Séoul.
La Corée du Sud devra s’adapter à l’augmentation prévisible de ces épisodes de mousson extrêmes sous l’effet du changement climatique.