L’Affaire AOG Technics : Un Scandale qui Secoue l’Industrie Aéronautique
L’industrie aéronautique mondiale est actuellement secouée par un scandale retentissant impliquant la société britannique AOG Technics. Cette entreprise est accusée d’avoir falsifié les documents de certification de pièces de moteurs CFM56, utilisés dans les réacteurs de Safran et GE qui équipent les célèbres Boeing 737 et Airbus A320. Alors que près d’une centaine de moteurs ayant intégré ces pièces frauduleuses ont déjà été identifiés, l’impact potentiel sur la flotte aérienne mondiale est loin d’être négligeable.
L’Épée de Damoclès au-dessus de l’Industrie Aéronautique
L’industrie aéronautique est actuellement confrontée à une énigme délicate : sera-t-il nécessaire de retirer et d’inspecter des centaines de moteurs de type A320 et 737 à la recherche de pièces non conformes ? C’est la question qui plane au-dessus de l’industrie depuis le début de l’affaire AOG Technics, qui a éclaté il y a trois semaines. Cette entreprise britannique est accusée d’avoir altéré les documents de certification de pièces de moteurs CFM56, le réacteur produit par CFM, une coentreprise entre Safran et GE, et utilisé dans les Boeing 737 et une partie des Airbus A320. En d’autres termes, elle aurait manipulé les documents de traçabilité des pièces avant de les écouler auprès de divers ateliers de maintenance, en falsifiant les certificats pour qu’ils ressemblent à ceux de CFM.
L’Enquête en Cours
La principale question qui se pose est de savoir combien de moteurs et, par extension, d’avions, sont concernés par ces pièces frauduleuses. “À ce jour, précisément 96 moteurs ont été identifiés avec des pièces provenant d’AOG Technics”, a déclaré Olivier Andriès, le directeur général de Safran, lors d’une réunion avec l’Association des journalistes professionnels de l’aéronautique et de l’espace (AJPAE) le 22 septembre. Certaines compagnies aériennes, dont United Airlines, Southwest et Virgin Australia, ont déjà repéré des pièces d’AOG Technics dans certains de leurs avions. Cependant, il est encore impossible de déterminer le nombre final de moteurs concernés. “Le marché des pièces détachées est un marché ouvert”, a souligné M. Andriès. “Avant cette affaire, nous ne connaissions pas AOG Technics.”
Une Chasse aux Pièces Complexes
La recherche et le retrait des pièces frauduleuses s’annoncent comme une tâche ardue. En effet, plus de 34 000 moteurs CFM56 ont été vendus dans le monde, faisant de ce réacteur le plus vendu de l’histoire de l’aviation. Les avocats de Safran, GE et CFM ont évoqué lors d’une audience devant un tribunal britannique le 20 septembre “plusieurs milliers de pièces” potentiellement concernées. Parmi celles-ci figurent des pièces telles que des vannes de compresseur haute pression ou des pales de turbines. À ce stade, il est encore difficile de déterminer si ces pièces sont défectueuses, contrefaites ou si le problème réside uniquement dans la falsification de leurs certificats.
La Potentielle Catastrophe
Alors, s’agit-il d’une catastrophe imminente ? Heureusement, il y a quelques lueurs d’espoir dans cette affaire complexe. Tout d’abord, le tribunal de Londres a ordonné à AOG de divulguer toutes ses transactions liées aux moteurs CFM56 dans les 14 jours à venir, ce qui devrait faciliter les enquêtes en cours. Deuxièmement, il semblerait que les faux certificats ne concernent pas nécessairement des pièces critiques pour la sécurité des vols, ce que l’on appelle communément des “pièces à durée de vie limitée” dans le jargon de l’aviation, comme l’a indiqué Olivier Andriès. “À ma connaissance, il n’y a pas de pièces à durée de vie limitée, qui sont les plus critiques, mais nous n’avons pas encore identifié l’ensemble de la population”, a-t-il précisé.
Un Précédent Inquiétant
Il n’est pas rare de découvrir des pièces avec des certificats falsifiés, communément appelées “suspected unapproved parts” (SUP), dans l’industrie aéronautique. D’autres sociétés, telles que les américaines Sofly Aviation Services ou Secure Air Parts, ont déjà été pointées du doigt par les régulateurs de l’aviation tels que la FAA et l’EASA ces dernières années. Cependant, l’affaire AOG Technics se distingue par son ampleur, car elle concerne le best-seller CFM56, mettant ainsi en lumière une zone grise préoccupante au sein d’un secteur aéronautique pourtant soumis à des contrôles stricts. “Il est quand même étonnant qu’une entreprise quelque peu mystérieuse ait pu délivrer des certificats d’authenticité falsifiés”, a souligné le directeur général de Safran.
Le Mystère AOG Technics
Que sait-on exactement sur AOG Technics ? Malheureusement, très peu d’informations sont disponibles. Le site Internet de l’entreprise est devenu inaccessible depuis que l’affaire a éclaté. Selon les documents d’enregistrement de la société, elle a été fondée en février 2015. Son fondateur, Jose Zamora Yrala, âgé de 35 ans et de nationalité vénézuélienne, détient plus de 75% des parts de l’entreprise.
Outre la création de faux documents de certification, il semble que la société britannique ait également falsifié les profils LinkedIn de certains de ses cadres. L’agence Bloomberg a mis en lumière le cas de Ray Kwong, présenté comme le directeur commercial d’AOG Technics. Son profil mentionne des expériences chez All Nippon Airways et Nissan, mais les deux entreprises japonaises n’ont trouvé auc
une trace de cette personne. Des soupçons similaires pèsent sur un certain Johnny Rico, présenté comme le directeur des ventes d’AOG, et prétendument ancien employé de Ryanair. Bloomberg a découvert sa photo sur le site Web d’un cabinet dentaire. La photo de profil d’un troisième “cadre” d’AOG, Michael Smith, a été retrouvée par Bloomberg sur le site d’un médecin spécialiste des troubles de la mémoire. En 2020, la société se vantait de fournir un excellent service et une réponse rapide 24 heures sur 24, une affirmation qui suscite aujourd’hui des sourires ironiques chez les clients d’AOG, trois ans plus tard.
Conclusion
L’affaire AOG Technics continue d’ébranler l’industrie aéronautique mondiale, suscitant des inquiétudes quant à l’intégrité des pièces utilisées dans les avions commerciaux. Alors que les enquêtes se poursuivent pour identifier l’ampleur de la fraude, les compagnies aériennes, les fabricants de moteurs et les autorités de régulation travaillent conjointement pour assurer la sécurité des vols. Cette affaire met en lumière la nécessité de maintenir des normes strictes et de renforcer les mécanismes de contrôle au sein de l’industrie aéronautique, afin de prévenir de tels scandales à l’avenir.