Une cible moléculaire inédite pour lutter contre le paludisme
La lutte contre le paludisme vient de connaître une avancée majeure avec la découverte d’une nouvelle molécule, la KNX-002. Sa particularité ? Elle vise une structure moléculaire clé du Plasmodium, le parasite responsable du paludisme, qui n’a jamais été ciblée par les traitements existants : la myosine A (PfMyoA).
Cette dernière joue un double rôle crucial pour le parasite. D’une part, elle lui fournit la capacité de mouvement, d’autre part, elle lui donne la force nécessaire pour envahir les globules rouges, où il se reproduit. Une équipe de chercheurs internationaux, comprenant des membres de l’Institut Curie et du CNRS, ainsi que des scientifiques de l’Université du Vermont, de l’Imperial College de Londres et de l’ESRF à Grenoble, ont réussi à identifier et évaluer les capacités de cette nouvelle substance.
La KNX-002, une clef bloquant le moteur du parasite
Le paludisme est une maladie infectieuse mortelle causée par le Plasmodium, un protozoaire unicellulaire transmis à l’homme par la piqûre d’un moustique anophèle. Le cycle de vie du parasite est complexe et implique plusieurs transformations, notamment dans le foie et les globules rouges. La PfMyoA est présente dans toutes les formes du parasite, ce qui en fait une cible particulièrement intéressante pour le développement de nouveaux traitements.
La KNX-002, une petite molécule identifiée lors d’un criblage de composés, a montré une capacité exceptionnelle à inhiber l’activité de la PfMyoA. Pour comprendre son mécanisme d’action, les chercheurs ont utilisé des techniques de cristallisation et la lumière du nouveau synchrotron EBS de l’ESRF à Grenoble. Ils ont ainsi découvert que la KNX-002 se fixe près de la poche de liaison de l’ATP du moteur moléculaire, bloquant ainsi sa production de force.
Le potentiel d’une nouvelle classe de médicaments
Ces résultats, publiés dans la revue Nature Communications, ouvrent la voie au développement d’une nouvelle classe de médicaments antipaludéens. Cette nouvelle approche présente plusieurs avantages. D’abord, la PfMyoA diffère significativement de la machinerie moléculaire humaine, ce qui suggère qu’un médicament ciblant spécifiquement cette structure ne serait pas toxique pour l’homme. De plus, en ciblant une mécanique finement régulée du parasite, le risque d’apparition de résistances par mutation pourrait être limité.
L’identification précise du site de fixation de la KNX-002 est une information précieuse qui permettra aux chimistes de concevoir des molécules encore plus efficaces. Cependant, le chemin vers la mise au point d’un médicament est long et
complexe. Il faudra notamment prendre en compte les contraintes spécifiques liées au terrain, comme l’accès difficile aux soins dans de nombreuses zones endémiques et l’adaptation du traitement aux enfants de moins de cinq ans, principales victimes du paludisme. Une start-up américaine a d’ores et déjà commencé à travailler sur le développement de ces nouvelles molécules.
Cette avancée représente une lueur d’espoir dans le combat mondial contre le paludisme, maladie qui cause plus de 500 000 décès chaque année à travers le monde.