Cancer du sein : Une nouvelle piste prometteuse pour le traitement anticancéreux

La découverte révolutionnaire de la polymérase thêta (Polθ)

Une équipe de chercheurs français a récemment fait une avancée majeure dans la compréhension des mécanismes de réparation de l’ADN, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles perspectives de traitement contre le cancer du sein et de l’ovaire. Cette découverte repose sur l’étude de l’enzyme appelée polymérase thêta (Polθ). En inhibant son action, les chercheurs espèrent révolutionner les thérapies anticancéreuses.

Un mécanisme de réparation inédit

Contrairement à d’autres enzymes de réparation, la Polθ est capable d’intervenir pendant la division cellulaire. Les chercheurs ont révélé qu’elle jouait un rôle essentiel dans le développement des cancers du sein et de l’ovaire. En comprenant son mode d’action, ils ont ouvert la porte à de nouvelles possibilités de traitement contre ces redoutables maladies.

L’ADN, une cible vulnérable

Notre génome est constamment exposé à diverses agressions telles que les rayonnements ultraviolets, les radiations ionisantes, les agents génotoxiques et les erreurs de réplication. Ces facteurs peuvent endommager l’ADN, provoquant jusqu’à un million de lésions par jour, certaines plus sévères que d’autres. Les lésions peuvent prendre la forme d’altérations, de pertes de bases nucléiques, de liens intrabrins ou de cassures simples ou doubles brins. Les cassures qui touchent les deux brins simultanément sont particulièrement délétères. Heureusement, notre organisme dispose de mécanismes de réparation, notamment la « recombinaison homologue » (RH) et la « jonction d’extrémités non homologues » (JENH). Cependant, en cas de dysfonctionnement de ces mécanismes, par exemple en raison de mutations génétiques, cela peut conduire au développement d’un cancer.

Le rôle crucial de la Polθ

Des études antérieures ont révélé que la moitié des cancers épithéliaux de l’ovaire présentaient des altérations dans les gènes responsables de la réparation par recombinaison homologue. En 2015, la Polθ est apparue comme une lueur d’espoir dans le traitement de ces cancers. Le Dr Raphaël Ceccaldi et son équipe ont découvert une corrélation inverse entre l’activité de la recombinaison homologue et l’expression de la Polθ dans ces types de cancer.

La réparation pendant la mitose

L’étude de l’équipe de chercheurs a révélé que la Polθ était essentielle à la survie des cellules déficientes en recombinaison homologue. Elle joue un rôle crucial dans la réparation des cassures double brin pendant la mitose, une phase du cycle cellulaire où les autres mécanismes de réparation, tels que la recombinaison homologue ou la jonction d’extrémités non homologues, sont inhibés en raison de la compaction extrême du matériel génétique.

Une activation spécifique

La Polθ ne peut être activée que pendant la mitose, et sa phosphorylation par la Polo-like kinase 1 (PLK1), une autre enzyme présente lors de cette phase, est nécessaire. La phosphorylation de la PLK1 limite les voies classiques de réparation des cassures double brin (RH et JENH), mais permet la réparation des extrémités mitotiques par la Polθ. Cette enzyme phosphorylée interagit directement avec les domaines C-terminaux BRCA1 de TOPBP1 vers les cassures double brin mitotiques, réparant ainsi les bris de l’ADN, même dans les cellules cancéreuses.

Le rôle vital de la Polθ

L’inhibition de la Polθ entrave la réparation des cassures double brin pendant la division cellulaire, entraînant une perte d’intégrité du génome. Ce phénomène est encore plus prononcé dans les cellules déficientes en recombinaison homologue, où la perte de la réparation par la Polθ conduit à la mort cellulaire. Cette observation renforce la corrélation létale entre la Polθ et la recombinaison homologue précédemment identifiée.

Une évolution conservée

L’équipe de recherche a également constaté que les mécanismes permettant l’activation de la Polθ semblaient avoir été extrêmement conservés au cours de l’évolution. Cela suggère que ces mécanismes jouent un rôle essentiel dans le développement des organismes eucaryotes en maintenant la stabilité du génome.

L’avenir de la recherche et du traitement

Près de la moitié des cancers du sein et de l’ovaire présentent des défauts de réparation de l’ADN par recombinaison homologue. Cette découverte constitue donc une avancée cruciale dans la lutte contre ces types de cancer. Approfondir nos connaissances sur les mécanismes moléculaires régissant l’utilisation et la régulation de la Polθ pourrait ouvrir la voie au développement de nouvelles cibles thérapeutiques pour le traitement du cancer.

Des chiffres alarmants

Le cancer du sein demeure le cancer le plus fréquent chez les femmes en France, représentant 33 % des nouveaux cas de cancer et causant plus de 12 000 décès chaque année. Selon la Ligue contre le cancer, plus de 61 000 nouveaux cas ont été signalés en 2023. En ce qui concerne le cancer de l’ovaire, bien qu’il soit moins répandu, il touche environ 5300 femmes par an en France. Ses symptômes peu spécifiques rendent souvent son diagnostic tardif et son traitement difficile. Il est responsable de 3500 décès chaque année.

Conclusion

La découverte de la Polθ en tant que composante essentielle de la réparation de l’ADN pendant la mitose ouvre de nouvelles perspectives dans la lutte contre le cancer du sein et de l’ovaire. Comprendre les mécanismes sous-jacents de cette enzyme pourrait conduire au développement de traitements plus efficaces et ciblés, offrant ainsi un espoir renouvelé aux patients atteints de ces cancers dévastateurs.

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