Introduction
La Tunisie, autrefois considérée comme un pays d’accueil pour les migrants, fait désormais face à une situation de plus en plus tendue en matière d’immigration illégale. Sous la présidence autoritaire de Kaïs Saïed, le pays a durci sa politique envers les Subsahariens en transit et a intensifié ses efforts pour solliciter l’Europe. Dans cet article, nous explorons la crise migratoire en Tunisie, ses causes profondes, ses conséquences et les réponses politiques qui en découlent.
Les migrants en Tunisie : Une réalité difficile
À quelques kilomètres de Sfax, la principale ville économique de la Tunisie, des migrants subsahariens parcourent les routes à travers les oliveraies. Ils sont épuisés, assoiffés et sans ressources, cherchant désespérément à réaliser leur rêve de rejoindre l’Europe, notamment l’île italienne de Lampedusa. Parmi eux se trouve Abdou Nahman, originaire du Darfour, au Soudan, qui partage son périple terrifiant à travers la Libye, où il a été emprisonné, torturé et hospitalisé pendant des mois.
Malgré les dangers et les difficultés, Abdou Nahman et ses compagnons sont déterminés à tenter à nouveau la traversée vers l’Europe. Leur espoir et leur persévérance sont palpables, même dans les conditions les plus précaires.
Durcissement de la répression
Cependant, la situation en Tunisie s’est considérablement détériorée ces derniers temps. En septembre, des centaines de migrants subsahariens ont été expulsés du centre-ville de Sfax et dispersés dans les champs environnants. Les associations locales, telles que Terre d’Asile, l’Association tunisienne des femmes démocrates et le Croissant-Rouge, sont désormais confrontées à des difficultés pour fournir de la nourriture et des médicaments aux migrants.
Le président Kaïs Saïed a adopté une rhétorique raciste inhabituelle en Tunisie, accusant les migrants de vouloir « modifier la composition démographique du pays ». Cette rhétorique a été suivie de mesures discriminatoires, notamment l’interdiction de loger des Subsahariens, ce qui a déclenché une vague de violences.
Romdhane Ben Amor, responsable des questions migratoires au sein du FTDES (Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux), explique que cette répression vise à pousser les migrants à quitter le pays, car la Tunisie est devenue la principale route pour les Africains cherchant à migrer en Europe, en contournant la côte libyenne fortement surveillée.
L’impact sur la société tunisienne
Bien que le nombre de migrants en Tunisie soit relativement modeste par rapport à la population totale du pays, la cohabitation avec la société tunisienne est devenue tendue. La députée Fatma Mseddi souligne les défis posés par la présence importante de migrants dans certaines régions, notamment pour les jeunes Tunisiens qui doivent passer entre de grands groupes de migrants pour se rendre à l’école.
La crise migratoire sert les intérêts de Kaïs Saïed, qui a pris le pouvoir en juillet 2021 et fait face à une série de crises économiques, notamment la croissance stagnante, la baisse des investissements, un taux de pauvreté record et un exode massif des jeunes.
En quête de soutien financier
Face à ces défis économiques, le président Saïed semble chercher des boucs émissaires pour détourner l’attention de ses problèmes. Il blâme le FMI, les spéculateurs et les hommes d’affaires, mais aussi les migrants, qui pourraient potentiellement lui apporter un soutien financier.
En juillet 2023, la Tunisie et la Commission européenne ont signé un accord prévoyant une aide financière de 700 millions d’euros, dont 105 millions destinés à lutter contre l’immigration illégale. Cependant, Kaïs Saïed a récemment rejeté ces fonds, qualifiant cette aide de « charité » et critiquant le montant jugé « dérisoire ». Cette décision suscite des interrogations sur l’avenir de la coopération entre la Tunisie et l’Europe dans la gestion de la crise migratoire.
Conclusion
La Tunisie est confrontée à une crise migratoire croissante, exacerbée par les difficultés économiques et la rhétorique raciste de son président. Les migrants subsahariens, en quête d’un meilleur avenir en Europe, continuent de faire face à des défis énormes en Tunisie. La répression accrue et le rejet de l’aide financière de l’Europe soulèvent des questions sur l’avenir de la politique migratoire tunisienne et de sa coopération internationale.