Décryptage d’un Phénomène Cosmique Énigmatique
Les trous noirs, ces entités cosmiques fascinantes et mystérieuses, ont toujours été au cœur de nombreuses théories et spéculations. Ils sont réputés pour leur capacité à engloutir sans relâche tout ce qui se trouve à proximité. Cependant, une révélation récente a ébranlé notre compréhension de ces objets célestes, montrant que ce processus d’accrétion peut s’arrêter, et cela grâce à un phénomène intrigant appelé le Disque d’Accrétion Magnétiquement Arrêté (MAD).
La Diversité des Trous Noirs
Les trous noirs se déclinent en différentes catégories, des supermassifs aux binaires, en passant par les stellaires. Malgré leurs différences, la plupart de ces trous noirs partagent une caractéristique commune : leur disque d’accrétion. Ce disque se forme lorsque du gaz s’effondre en spirale vers le noyau dense du trou noir, créant une sorte de tourbillon. Étonnamment, ce processus d’absorption de la matière environnante peut désormais être interrompu.
La Théorie du Disque d’Accrétion Magnétiquement Arrêté (MAD)
La théorie du MAD, ou Disque d’Accrétion Magnétiquement Arrêté, a été formulée pour la première fois en 2003 par l’astrophysicien Ramesh Narayan et son équipe. Selon cette théorie, la présence d’un champ magnétique suffisamment puissant près du trou noir peut contrecarrer sa force d’attraction dévastatrice. En octobre 2021, une étude suggérait déjà la possibilité de l’existence d’un MAD dans le système binaire MAXI J1820+070.
Une Découverte Révolutionnaire
Situé à environ 10 000 années-lumière de la Terre, le système binaire MAXI J1820+070 se compose d’une étoile dont la masse atteint la moitié de celle du Soleil, vampirisée par un trou noir d’environ huit masses solaires. La première observation confirmée d’un disque d’accrétion stoppé par un champ magnétique a été annoncée le 31 août 2023 par une équipe de recherche internationale dirigée par Bei You, du département d’astronomie de l’université de Wuhan en Chine.
La Quête des Disques d’Accrétion Instables
Pour observer un MAD, il est nécessaire de s’intéresser à un trou noir en état d’éruption, c’est-à-dire un trou noir dont le disque d’accrétion a perdu sa stabilité et émet des rayonnements dans différentes longueurs d’onde. Jean-Marie Hameury, directeur de recherche émérite CNRS à l’Observatoire Astronomique de Strasbourg et co-auteur de l’étude de Bei You, explique que la stabilité d’un disque dépend de sa température. Un disque est stable s’il est extrêmement froid ou extrêmement chaud. Cependant, un disque dont la température se situe entre ces deux extrêmes devient instable.
Des Observations Étonnantes
L’équipe de Bei You a analysé les données de l’éruption du système MAXI J1820+070, recueillies en 2018, et a découvert un phénomène surprenant. Elle a observé un décalage significatif de plusieurs jours entre chaque pic d’émission, allant de 8 à 17 jours. Jamais auparavant de tels délais n’avaient été enregistrés. Cette observation laisse entrevoir la présence possible d’un MAD.
Les Mécanismes en Action
Le jour de l’éruption de MAXI J1820+070, un premier pic de rayons X est émis. Par la suite, la puissance du champ magnétique entourant le disque d’accrétion ne cesse de croître. Cette instabilité du disque entraîne un apport accéléré de matériaux magnétisés, contribuant à l’épaississement du disque tout en renforçant le champ magnétique dans la région interne.
Le Rôle Clé de l’ADAF
Vers la fin de l’éruption, les régions internes du disque d’accrétion entrent dans un régime d’accrétion connu sous le nom d’ADAF (Flux d’Accrétion Dominé par l’Advection). La densité de la matière absorbée diminue, et cette dernière n’a pas le temps de rayonner son énergie. En conséquence, elle atteint des températures dépassant le milliard de degrés, provoquant l’émission d’un jet radio perpendiculaire au disque. Ce phénomène survient 190 jours après le début de l’éruption, marquant le pic d’émission des rayons X durs, plus énergétiques.
Le Champ Magnétique Contrebalance la Gravité
Pendant que l’accrétion se poursuit avec un disque interne de plus en plus chaud et épais, le champ magnétique gagne en intensité, tout comme la puissance du jet. Étonnamment, le champ magnétique commence à contrebalancer la force gravitationnelle massive exercée par le trou noir sur la matière environnante. C’est à ce moment que le MAD apparaît enfin, mettant fin à l’accrétion, huit jours après le pic des rayons X durs. Le jet radio atteint alors son intensité maximale.
Une Stabilité Précaire
Il est important de noter que malgré l’apparition du MAD, le système reste globalement instable. Des « paquets » de matière continuent d’être absorbés de manière irrégulière. Parallèlement, les rayons X durs émanent de la partie externe du disque, provoquant des émissions dans le domaine visible et relançant l’instabilité à l’origine de l’éruption. Le pic d’émission visible se produit 17 jours après celui des rayons X durs. Pour Jean-Marie Hameury, le rôle du MAD est indiscutable, car aucune autre explication ne peut expliquer ces décalages temporels dans les émissions.
Conclusion : La Découverte du Premier MAD Officiel
Cette observation révolutionnaire marque une avancée majeure dans notre compréhension des trous noirs et de leurs disques d’accrétion. Grâce à l’étude du système MAXI J1820+070, nous avons désormais une preuve tangible de l’existence du Disque d’Accrétion Magnétiquement Arrêté (MAD). Cette découverte nous ouvre de nouvelles perspectives passionnantes dans le domaine de l’astrophysique et de l’étude des phénomènes cosmiques les plus énigmatiques de l’univers.