Crise politique au Niger : 17 soldats tués et appels internationaux au dialogue

Attaque meurtrière à la frontière avec le Burkina Faso

Au moins 17 soldats nigériens ont été tués et 20 autres blessés mardi dans une embuscade tendue par des djihadistes présumés près de la frontière entre le Niger et le Burkina Faso. Selon le ministère nigérien de la Défense, l’attaque s’est déroulée en début d’après-midi près de la localité de Koutougou, sur l’axe entre les villes de Boni et Torodi.

Bien que l’attaque n’ait pas été revendiquée pour le moment, la région est le théâtre d’activités de divers groupes armés affiliés à Al-Qaïda ou à l’organisation État islamique. Ces groupes, dont le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) et l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS), profitent de la porosité des frontières dans cette zone sahélienne pour mener des attaques de part et d’autre des frontières entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso.

Cette embuscade meurtrière intervient dans un contexte de crise politique au Niger, où un coup d’État militaire a renversé le président Mohamed Bazoum le 26 juillet dernier. L’attaque démontre la fragilité sécuritaire du pays, en proie à des violences jihadistes récurrentes depuis plusieurs années malgré la présence de forces nationales et étrangères.

Appels internationaux au dialogue

Alors que la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) envisage une intervention militaire pour rétablir le président Bazoum, plusieurs pays ont appelé mardi à privilégier la voie diplomatique pour résoudre la crise politique au Niger.

Les États-Unis en particulier, par la voix du secrétaire d’État Antony Blinken, ont insisté sur l’importance de trouver une solution pacifique et constitutionnelle à la crise afin d’éviter une escalade des tensions. Blinken a souligné qu’il restait une marge de manœuvre pour une résolution par la diplomatie.

De son côté, la Russie a adopté un discours similaire. Lors d’un entretien téléphonique mardi, le président Vladimir Poutine et son homologue malien Assimi Goïta ont appelé à régler la situation au Niger uniquement par des moyens « pacifiques politico-diplomatiques ».

La Russie, qui a accru sa coopération militaire avec le Mali ces dernières années, semble soucieuse d’apaiser les tensions dans la région afin de préserver ses intérêts stratégiques.

Tensions grandissantes entre le Niger et la Côte d’Ivoire

De son côté, la junte militaire au pouvoir à Niamey a rappelé son ambassadeur en Côte d’Ivoire après des déclarations du président Alassane Ouattara jugées belliqueuses.

Ouattara avait affirmé le 11 août que les dirigeants ouest-africains étaient favorables au lancement rapide d’une opération militaire au Niger afin de rétablir l’ordre constitutionnel. « Les chefs d’État sont d’accord pour que l’opération démarre dans les plus brefs délais », avait-il déclaré, s’engageant à fournir un bataillon ivoirien.

La junte a vivement dénoncé « l’empressement » du président ivoirien à soutenir une « agression » militaire qu’elle juge « illégale et insensée » contre le Niger.

Ce rappel d’ambassadeur montre les tensions grandissantes entre le Niger et certains de ses voisins ouest-africains, au premier rang desquels la Côte d’Ivoire. Alassane Ouattara se pose en fer de lance d’une intervention musclée de la Cedeao pour rétablir l’ordre constitutionnel.

Réunion décisive des chefs d’état-major de la Cedeao

Les 17 et 18 août prochains, les chefs d’état-major des pays membres de la Cedeao se réuniront à Accra au Ghana pour discuter d’une possible intervention militaire au Niger.

Initialement prévue le 12 août, cette réunion aura lieu une semaine après la décision de la Cedeao de déployer une « force en attente » dans le but de réinstaller le président Bazoum, renversé par des militaires menés par le colonel Assimi Goïta.

L’issue de cette réunion sera déterminante quant au règlement de la crise politique au Niger. Une intervention militaire ouest-africaine semble une possibilité sérieuse, mais fait face à l’hostilité affichée de la junte au pouvoir à Niamey.

La réaction du Niger au blocage de sa frontière terrestre avec le Bénin par l’installation d’un container démontre la volonté de la junte de résister à une incursion extérieure.

Vers une déstabilisation accrue du Niger ?

La communauté internationale doit continuer à pousser pour une résolution pacifique afin d’éviter que le Niger ne sombre dans le chaos. Le pays, déjà fragilisé par l’insécurité jihadiste et une situation politique instable, a plus que jamais besoin de stabilité institutionnelle.

Une intervention militaire de la Cedeao, si elle venait à se confirmer, risquerait au contraire d’aggraver les tensions politiques et sociales. La junte pourrait appeler la population et l’armée à résister à une incursion étrangère perçue comme illégitime.

La priorité doit rester le rétablissement de l’ordre constitutionnel par la négociation. Pour cela, un dialogue inclusif entre la junte, les partis politiques, la société civile et les leaders religieux est indispensable. L’objectif doit être la tenue rapide d’élections libres et transparentes, seule issue viable face à la crise.

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