Nucléaire et centres de données : quand la technologie tourne à plein réacteur

Introduction

Les besoins énergétiques ne cessent de croître à mesure que notre monde devient de plus en plus digital. Des intelligences artificielles génératives à l’infrastructure massive des centres de données, les GAFAM (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft) ont faim, très faim d’énergie. Mais où trouver la puissance nécessaire pour satisfaire ces appétits gigantesques ? Une piste très sérieuse s’offre à nous : le retour au nucléaire. En particulier, les petits réacteurs modulaires, ou SMR (Small Modular Reactors), pourraient bien être la solution. Alors, prêts pour un voyage énergétique à travers le nucléaire et le cloud ?

Microsoft à la relance du nucléaire : les centres de données ont leur électricité

Le mois dernier, Constellation Energy, un groupe américain de production d’énergie, a annoncé la relance d’un réacteur nucléaire à Three Mile Island, en Pennsylvanie, pour alimenter des centres de données de Microsoft en électricité. Oui, vous avez bien lu, Three Mile Island, le même site qui avait été le théâtre du plus grave accident nucléaire de l’histoire des États-Unis en 1979. Le réacteur concerné est l’unité 1, qui était restée en service jusqu’en 2019 avant d’être mise en pause, mais qui pourrait maintenant revenir pour alimenter la machine numérique de Microsoft durant les 20 prochaines années.

Mais pourquoi ce retour au nucléaire ? En un mot : les centres de données. Le développement de l’IA générative demande des capacitsés de calcul vertigineuses. À titre de comparaison, une recherche sur un modèle de langage perfectionné utilise environ 30 fois plus d’énergie qu’une recherche classique. On estime d’ailleurs qu’à l’horizon 2030, l’intelligence artificielle pourrait représenter à elle seule entre 3 et 4 % de la demande mondiale d’électricité. Autant dire que c’est un secteur qui carbure !

Petits réacteurs modulaires : le futur du nucléaire (et du cloud) ?

Avec les besoins énergétiques colossaux des GAFAM, les regards se tournent également vers une technologie prometteuse : les petits réacteurs modulaires, ou SMR. Ces mini-centrales nucléaires présentent plusieurs avantages : un coût d’investissement plus faible, une construction en usine, et une flexibilité qui en fait une option très intéressante pour les grandes entreprises tech. Microsoft, Amazon et même Oracle se montrent déjà intéressés par cette solution.

L’idée derrière les SMR est simple : au lieu de construire des centrales géantes et onéreuses, pourquoi ne pas produire des modules plus petits qui pourraient être assemblés comme des LEGO ? Mathieu Hursin, chercheur à l’EPFL, explique que cela permettrait de faire des économies d’échelle et de réduire les risques financiers pour les industriels. En gros, les SMR sont la version nucléaire de la pizza surgelée : prêts à l’emploi, plus petits, mais tout aussi efficaces.

Cependant, même si certains experts pensent que les premiers SMR pourraient entrer en service dès 2030, il reste encore du travail. Construire une centrale nucléaire, même petite, n’est pas exactement comme monter une étagère IKEA. Mais les perspectives semblent réalistes, et les premières autorisations ont déjà été données, comme pour Oracle, qui a reçu le feu vert pour construire un centre de données alimenté par ces mini-réacteurs.

Le nucléaire, la seule solution ?

Pour les partisans de cette technologie, revenir au nucléaire est une solution rationnelle face à la crise énergétique et aux besoins croissants des supercalculateurs et IA. En Finlande, par exemple, une partie de l’énergie produite par une centrale nucléaire est déjà destinée aux centres de données. C’est une manière de garantir un approvisionnement stable, et de dire adieu aux pannes énergétiques qui pourraient éteindre les serveurs de Netflix en plein milieu de votre série préférée.

Mais tout le monde n’est pas convaincu par cette voie. Yves Marignac, expert nucléaire et membre de l’association NégaWatt, estime que ce retour au nucléaire est surtout le reflet d’une incapacité à renoncer à l’abondance énergétique, voire à une certaine ébriété énergétique. Pour lui, l’utilisation de l’IA devrait s’accompagner d’un questionnement sur son usage et sa modération. Si l’on se contente de développer l’offre énergétique sans réfléchir à la demande, on prend le risque de foncer droit dans le mur.

L’énergie du futur : plus verte, plus petite, ou plus nucléaire ?

Face à ces débats, la question reste posée : quel sera l’avenir énergétique des GAFAM et, par extension, de notre monde numérique ? Les énergies renouvelables sont également sur la table, mais elles souffrent parfois d’une intermittence qui ne convient pas à la demande constante des centres de données. Imaginez un centre de données qui s’éteint chaque fois qu’il n’y a pas assez de vent ! Ce n’est pas vraiment l’idéal pour assurer la disponibilité de vos photos de vacances stockées sur le cloud.

Les SMR, s’ils parviennent à remplir leurs promesses, pourraient donc bien devenir une pièce importante du puzzle. Mais ce qui est certain, c’est que nous sommes à la croisee des chemins. L’équation énergétique est complexe, et il nous faudra sans doute mixer technologies, innovation et modération pour trouver une solution viable. Et si, au final, la solution n’était pas seulement d’avoir plus d’énergie, mais d’apprendre à mieux la consommer ?

Conclusion

Le retour au nucléaire pour alimenter nos centres de données en énergie est une piste sérieuse, mais controversée. Entre la promesse de stabilité énergétique offerte par des technologies comme les SMR et les interrogations sur la pertinence d’une énergie nucléaire face aux risques qu’elle comporte, le débat est loin d’être clos. Une chose est sûre, cependant : l’évolution technologique continuera d’exiger toujours plus d’énergie, et il nous appartient de décider de la manière dont nous souhaitons la produire.

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