L’espace aérien mondial se réduit : défis et conséquences pour les compagnies aériennes

Des zones à risques en expansion

L’espace aérien mondial, un territoire autrefois infini pour les compagnies aériennes, se réduit progressivement. Les restrictions de survol imposées par les autorités, en raison de la multiplication des zones à risques, créent des défis majeurs pour l’industrie aéronautique. Les compagnies aériennes font face à des perturbations importantes de leurs opérations, des coûts croissants, et des ajustements stratégiques pour s’adapter à ce nouvel environnement.

Les menaces volcaniques

Lorsqu’un volcan entre en éruption, les conséquences peuvent être ressenties dans le ciel. Les responsables des programmes de vol des compagnies aériennes sont conscients de cette réalité. Récemment, les yeux du monde étaient tournés vers l’Islande, où un volcan sous-marin menaçait d’entrer en éruption. Le souvenir de l’explosion du cratère d’Eyjafjöll en 2010, qui avait entraîné la fermeture de l’aéroport de Reykjavik, est encore vif.

La possibilité que l’Islande soit à nouveau temporairement rayée de la carte aérienne mondiale suscite de vives inquiétudes. Cette préoccupation survient à un moment où l’espace aérien mondial connaît une réduction sans précédent. Depuis cinquante ans, le monde s’ouvrait de plus en plus, mais aujourd’hui, il semble se refermer.

Zones à risques de survol en expansion

Au fil des derniers mois, de nouvelles zones à risques de survol sont apparues sur la carte établie par la Direction générale de l’aviation civile (DGAC). Les conflits géopolitiques, les tensions régionales et les activités militaires ont contribué à cette expansion inquiétante des zones à risques.

L’impact des conflits géopolitiques

C’est avec l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe en février 2022 que le rétrécissement de l’espace aérien a commencé. Après deux années de pandémie, les pilotes se sont retrouvés face à une triple problématique à l’Est de l’Europe : la fermeture de l’espace aérien ukrainien, la suspension des vols entre la Russie et l’Union européenne, et l’interdiction pour les compagnies européennes de survoler la Sibérie.

Un porte-parole d’Eurocontrol, l’organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne, explique que les activités militaires dans l’espace aérien européen ont triplé depuis l’invasion. En conséquence, le réseau européen a perdu jusqu’à 20 % de son espace aérien.

Les défis au Sahel et au Sahara

Presque dix-huit mois plus tard, c’est au Niger que la situation s’est compliquée avec le putsch d’une junte militaire, interdisant aux avions français de survoler une grande partie de son territoire. Cette décision réduit encore davantage l’espace aérien dans la région du Sahel et du Sahara, déjà impacté par les fermetures au-dessus du Soudan et de la Libye.

Le conflit au Haut-Karabakh en septembre dernier a également temporairement fermé une partie de l’espace aérien azerbaïdjanais. L’attaque du Hamas sur Israël en octobre a ajouté une autre zone à risques à la liste.

Les conséquences pour les compagnies aériennes

Suspension de lignes et impact sur les aéroports

La réduction de l’espace aérien a des conséquences directes sur les compagnies aériennes. La première conséquence est la suspension de certaines lignes aériennes. Par exemple, après le putsch au Niger, Air France a cessé ses vols vers ce pays ainsi que vers ses destinations voisines, le Mali et le Burkina Faso. Aucune de ces lignes n’a été rétablie depuis.

Les aéroports ne sont pas épargnés non plus. Augustin de Romanet, PDG du groupe Aéroports de Paris (ADP), souligne que l’année 2022 a vu une diminution de moitié du trafic en provenance de Russie dans les aéroports turcs, et une interruption totale du trafic en provenance d’Ukraine.

Trajectoires compliquées et temps de vol prolongés

La deuxième conséquence est la complexification des trajectoires de vol. Les compagnies aériennes doivent désormais contourner les zones à risques, ce qui entraîne un allongement significatif des temps de vol. Par exemple, pour se rendre au Japon, en Corée ou en Chine depuis Paris, Air France doit éviter la Sibérie, ce qui ajoute environ deux heures de vol.

La même logique s’applique aux vols Paris-La Réunion en raison du conflit au Proche-Orient. Marc Rochet, ancien PDG d’Air Caraïbes et de French bee, explique que pour ce trajet, les avions doivent traverser le Moyen-Orient, la mer Rouge et plusieurs pays africains. Il n’y a que quelques voies de passage sécurisées, et la surveillance constante est nécessaire. En cas de fermeture de l’espace aérien en Égypte, il faudrait envisager un détour important, voire une escale. Le prolongement des temps de vol entraîne une augmentation des coûts liés au carburant et au personnel, ce qui constitue le troisième défi pour les compagnies aériennes.

Distorsions de concurrence

Le contexte géopolitique a également créé des distorsions de concurrence. Alors que les compagnies européennes ne peuvent plus survoler la Russie, les compagnies chinoises bénéficient toujours de cette possibilité. Les compagnies chinoises peuvent donc proposer des vols Paris-Pékin plus courts et moins chers que ceux d’Air France.

En parallèle, les passagers voyageant entre l’Union européenne et la Russie sont désormais contraints de passer par la Turquie ou les pays du Golfe, ce qui profite à des compagnies comme Turkish Airlines, Emirates ou Qatar Airways.

Adaptation et résilience

Malgré les défis rencontrés, certaines lignes suspendues étaient symboliques et représentaient une part relativement faible du trafic total. Par exemple, Israël ne représentait qu’1,1 million de passagers en 2019, soit près d’1,1 % du trafic total à Paris. De plus, les compagnies ont appris à s’adapter rapidement aux perturbations, en redéployant leurs avions vers des destinations plus attractives en fonction des événements.

Cependant, un dernier risque persiste : le climat anxiogène créé par la réduction de l’espace aérien et les tensions géopolitiques pourrait décourager les voyageurs de choisir des destinations lointaines. Cette incertitude plane sur l’industrie aérienne, qui doit continuer à trouver des solutions pour maintenir son activité malgré un ciel de plus en plus restreint.

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