Un Projet de Taxation Revu en Réponse aux Critiques
Le gouvernement italien, dirigé par Giorgia Meloni, a récemment apporté des modifications significatives à son projet de taxe controversée sur les bénéfices exceptionnels des banques. Cette initiative a suscité de nombreuses critiques, notamment de la part de la Banque centrale européenne (BCE). Dans cet article, nous examinerons en détail ces changements, les réactions de divers acteurs et l’impact potentiel sur l’économie italienne.
La Nouvelle Proposition de Taxe
Selon les agences de presse italiennes, le gouvernement italien a proposé un amendement au projet de taxe sur les bénéfices exceptionnels des banques. Cet amendement permettrait aux banques de choisir entre payer le prélèvement ou augmenter leurs réserves non distribuables, également connues sous le nom de réserves bloquées, d’un montant équivalent à deux fois et demie l’impôt. Cette modification diffère considérablement de la version initiale du projet, qui prévoyait une taxe unique de 40 % sur les « surprofits » résultant de la série de relèvements des taux d’intérêt de la BCE au cours de l’année précédente. Cette proposition initiale avait créé de l’incertitude sur les marchés financiers et entraîné une baisse des actions des banques italiennes. Par la suite, le gouvernement avait revu son plan, annonçant que la nouvelle taxe serait plafonnée à 0,1 % des actifs d’une banque.
Les Préoccupations de la BCE
Le 13 septembre, la BCE a émis un avis juridique dans lequel elle a exprimé ses préoccupations quant aux conséquences potentielles de cette taxe. La BCE a averti que la taxe pourrait réduire les réserves de capitaux des prêteurs, les rendant ainsi plus vulnérables aux futurs chocs économiques. En outre, l’application généralisée de cette taxe pourrait particulièrement affecter les établissements de crédit ayant des positions de solvabilité plus faibles, se concentrant davantage sur l’activité de prêt, comme les petites banques, ou ayant des projections de capital difficiles.
Le Parcours Législatif à Venir
Il est important de noter que le texte amendé de la taxe doit encore être approuvé par le Parlement italien, ce qui signifie qu’il pourrait encore subir des modifications avant de devenir loi. Giorgia Meloni, la Première ministre italienne, a récemment ouvert la porte à des « modifications », à condition que les recettes attendues de la taxe demeurent inchangées, soit un montant estimé à « un peu moins » de trois milliards d’euros.
Réactions de l’Industrie et des Acteurs Économiques
Le projet de taxation des bénéfices exceptionnels des banques suscite de vives réactions au sein de l’industrie financière italienne. Marina Berlusconi, la fille aînée de Silvio Berlusconi et présidente de la holding familiale Fininvest, a qualifié cette mesure de « démagogique » et a exprimé ses préoccupations quant à son impact sur l’attractivité du pays pour les investisseurs étrangers. La holding Fininvest détient une participation de 30,12 % dans la banque Mediolanum, qui a enregistré un bénéfice net de 522 millions d’euros en 2022.
Marina Berlusconi a déclaré lors d’une assemblée du patronat italien à Rome : « J’ai apprécié de nombreuses mesures du gouvernement Meloni, mais je dois dire que parmi elles ne figure pas l’impôt sur les surprofits des banques. »
Objectifs Économiques du Gouvernement
Cette taxe sur les superprofits des banques vise principalement à renflouer les caisses de l’État italien. Elle s’inscrit dans un contexte plus large de mesures économiques visant à redresser la situation financière de l’Italie. Parmi ces mesures, citons la réduction du « revenu de citoyenneté » destiné aux plus démunis et l’envisagement de nouvelles privatisations. Les difficultés économiques récentes, telles que la baisse inattendue du PIB de 0,4 % au deuxième trimestre et les problèmes économiques de l’Allemagne, principal partenaire commercial de l’Italie, ont pesé lourdement sur les finances nationales. De plus, le retard dans la mise en œuvre du plan de relance financé par des fonds européens a également contribué à la pression sur les finances du pays.
Autres Mesures en Cours d’Évaluation
En plus de la taxe sur les superprofits des banques, le gouvernement italien envisage d’autres mesures économiques. L’extension de l’impôt forfaitaire de 15 %, actuellement réservé aux auto-entrepreneurs et artisans gagnant jusqu’à 85 000 euros par an, aux salariés est l’une de ces propositions. Cependant, cette extension a été repoussée à une date ultérieure, tout comme la suppression définitive de la loi Fornero de 2011, qui fixait l’âge de départ à la retraite à 67 ans. Actuellement, un mécanisme temporaire permet aux Italiens de prendre leur retraite à 62 ans après avoir cotisé pendant 41 ans.
Le gouvernement prévoit également de réduire la charge fiscale pesant sur les revenus modestes, à un coût estimé à environ 10 milliards d’euros. Des mesures de soutien pour les familles nombreuses sont également à l’étude.
Perspective à Long Terme
Le gouvernement italien a tracé un horizon temporel pour la réalisation de ses promesses électorales, qui couvre la durée de la législature de cinq ans, soit jusqu’en 2027. Le vice-Premier ministre Matteo Salvini espère que la coalition au pouvoir « durera au moins dix ans pour accomplir tout ce qui doit être fait ». Cependant, l’Italie pourrait difficilement éviter de réviser à la hausse son objectif de déficit public pour 2023, actuellement fixé à 4,5 % du PIB, après avoir atteint 8 % en 2022. Pour 2024, avec un objectif de 3,7 % du PIB, cette cible semble tout aussi difficile à atteindre.
Le Défi des « Superbonus » pour les Passoires Thermiques
Un défi financier supplémentaire auquel l’Italie est confrontée est le coût élevé du programme d’incitations fiscales connu sous le nom de « superbonus ». Ce programme vise à rendre les logements moins énergivores et a été instauré en 2020 par le gouvernement de Giuseppe Conte pour stimuler l’économie. Cependant, Giorgia Meloni a exprimé sa préoccupation quant au coût de ce mécanisme, estimé à plus de 100 milliards d’euros. Une somme considérable pour un pays dont la dette publique dépasse actuellement 144 % du PIB, ce qui en fait le ratio le plus élevé de la zone euro après la Grèce.
L’Incertitude Concernant le Pacte de Stabilité
Rome avait espoir que le Pacte de stabilité serait suspendu en 2024 si aucune réforme n’était adoptée d’ici la fin de l’année. Cependant, le commissaire européen à l’Économie, Paolo Gentiloni, a récemment écarté cette possibilité. Le Pacte de stabilité limite le déficit des administrations publiques des États membres de la zone euro à 3 % du PIB et la dette publique à 60 % du PIB. En 2020, il avait été suspendu en raison de la pandémie de Covid-19, mais son avenir reste incertain.
Conclusion
La révision du projet de taxe sur les bénéfices exceptionnels des banques en Italie suscite un débat animé et soulève de nombreuses questions sur son impact potentiel sur l’économie nationale et les institutions financières. Alors que le gouvernement italien cherche à redresser ses finances et à réaliser ses promesses électorales, il devra naviguer avec précaution pour trouver un équilibre entre la taxation des bénéfices bancaires et la stabilité du secteur financier.