Une économie en berne
Après l’Allemagne, c’est au tour des Pays-Bas de sombrer en récession. L’économie néerlandaise s’est contractée pour le deuxième trimestre consécutif, avec une baisse de 0,3% du PIB entre avril et juin 2023, selon les chiffres publiés récemment par l’Office central des statistiques néerlandais (CBS). Cette récession technique fait suite à un premier trimestre déjà décevant, avec un recul de 0,4% du PIB.
Cette contre-performance est largement imputable à la chute de la consommation des ménages néerlandais. Les dépenses en meubles et vêtements ont particulièrement diminué, même si les secteurs culturels et de loisirs ont bénéficié d’une légère hausse. Le commerce extérieur a également plombé la croissance, avec une hausse des importations et un repli des exportations, notamment dans l’industrie chimique.
Une situation atypique en Europe
Cette récession néerlandaise contraste avec la situation de ses voisins européens. Certes, l’Allemagne est également en difficulté avec une industrie en berne. Mais dans l’ensemble, la zone euro a enregistré une hausse de 0,3% de son PIB au deuxième trimestre, tirée par la France (+0,5%) et l’Espagne (+0,4%), même si l’Italie a connu un recul inattendu (-0,3%).
Les Pays-Bas se distinguent donc par un net ralentissement, alors que leur économie s’était initialement redressée avec vigueur après la pandémie de Covid-19. Depuis un an environ, la tendance s’est inversée. « La contraction de 0,3% aux Pays-Bas est frappante comparée aux pays voisins », a souligné le CBS.
Des perspectives incertaines
Pour l’instant, ce déclin néerlandais ne se traduit pas par une dégradation majeure du marché du travail. Mais les prévisions de croissance pour 2023, autour de 1% pour la zone euro, semblent déjà obsolètes face aux signaux d’un net ralentissement de l’activité.
La politique monétaire restrictive de la BCE, qui vise à contenir une inflation toujours galopante, risque en effet de plomber un peu plus l’investissement et la consommation. Même si l’inflation dans la zone euro a légèrement reflué en juillet, elle reste très supérieure à l’objectif de 2% de la BCE.
Inflation : un phénomène persistant
Bien que l’inflation ait quelque peu ralenti en juillet dans la zone euro, passant de 5,5% à 5,3%, elle reste à un niveau historiquement élevé. L’indice des prix à la consommation avait atteint le pic de 6,1% en mai, porté par la flambée des coûts de l’énergie depuis le début de la guerre en Ukraine. Si l’énergie a amorcé une décrue en juin et juillet, d’autres composantes demeurent sous pression.
En particulier, l’alimentation a vu ses prix bondir de 10,8% sur un an. Les biens industriels hors énergie (+5%) et les services (+5,6%) affichent également des rythmes de hausse supérieurs à la cible de 2% de la BCE. Cette inflation dite « sous-jacente », qui exclut l’énergie et l’alimentaire, s’établit ainsi à un niveau très élevé de 5,5%.
Ce phénomène persistant grève le pouvoir d’achat des ménages et maintient la BCE en alerte. L’institut monétaire devrait poursuivre le relèvement progressif de ses taux directeurs dans les prochains mois.
Facteurs de vulnérabilité spécifiques
Outre le contexte inflationniste européen, l’économie néerlandaise présente des facteurs de vulnérabilité particuliers. Son secteur agricole pâtit de la sécheresse actuelle, tandis que son industrie chimique pèse sur les exportations. La consommation intérieure souffre quant à elle de la morosité ambiante, avec un moral des ménages au plus bas.
Le secteur immobilier montre également des signes de fragilité. Après la surchauffe des prix, les transactions ralentissent et l’accession à la propriété devient plus difficile avec la remontée des taux d’intérêt. Ce ralentissement risque de se propager à d’autres pans de l’économie.
Quid des mois à venir ?
Difficile dans ce contexte de prédire avec certitude l’évolution de la situation économique aux Pays-Bas dans les prochains mois. Si un rebond technique est possible au troisième trimestre, les nuages continuent de s’amonceler. Entre inflation tenace, consommation atone, investissements en berne et tensions géopolitiques persistantes, les ingrédients d’une reprise vigoureuse font défaut.
La zone euro dans son ensemble navigue à vue, tiraillée entre inflation et risque de récession. Son principal moteur, l’Allemagne, est en panne. La Réserve fédérale américaine vient encore compliquer la tâche de la BCE en resserrant agressivement sa politique monétaire. Bref, la sortie de récession s’annonce ardue pour les Pays-Bas et ses voisins européens.