La France condamne fermement le « coup d’État militaire » et l’UE menace de suspendre son aide
Le général Tchiani s’est autoproclamé président du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie après le coup d’État qui a renversé le président Bazoum mercredi soir. Cette prise de pouvoir anticonstitutionnelle a suscité de vives réactions au sein de la communauté internationale.
La France, par la voix de son ministère des Affaires étrangères et du président Emmanuel Macron, a fermement condamné ce « coup d’État militaire » et affirmé ne pas reconnaître la légitimité des putschistes. Selon Paris, Mohamed Bazoum, élu démocratiquement en 2021, reste « le seul président légitime de la République du Niger ». La France a appelé à un retour immédiat à l’ordre constitutionnel et réitéré son plein soutien aux autorités démocratiques nigériennes.
Le Niger est un allié de poids pour la France dans la lutte antiterroriste au Sahel. La France dispose de bases militaires sur le sol nigérien, à Niamey et Madama notamment. Perdre le Niger serait un coup dur pour l’influence française dans son ancien pré-carré africain. D’où la fermeté du discours de Paris, qui ne veut pas revivre un scénario à la malienne après avoir été poussée vers la sortie par la junte au pouvoir à Bamako.
De son côté, l’Union européenne a menacé de suspendre toute aide budgétaire au Niger si l’ordre constitutionnel n’était pas rétabli rapidement. Josep Borrell, chef de la diplomatie européenne, a qualifié le putsch d' »atteinte grave à la stabilité et à la démocratie » dans le pays et réaffirmé le soutien de l’UE aux efforts de la Cédéao pour un rétablissement rapide des institutions légitimes.
L’ONU exige la libération immédiate du président Bazoum
Le Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Volker Türk, a fermement condamné cette tentative de coup d’État, la jugeant choquante et affligeante. Il a exigé la libération immédiate et sans condition du président Bazoum, actuellement séquestré par les putschistes selon l’ONU.
Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres s’est également indigné de ce coup de force anticonstitutionnel. Il a appelé l’armée nigérienne à revenir dans les casernes et à libérer Mohamed Bazoum, rappelant que celui-ci était le président légitime et démocratiquement élu du Niger.
Le Niger, un allié clef dans la lutte antiterroriste au Sahel
Ce coup d’État fragilise un peu plus une région sahélienne déjà déstabilisée par la menace jihadiste. Le Niger était en effet considéré comme le dernier allié solide de l’Occident dans cette zone, où la France notamment dispose d’une importante présence militaire.
Outre l’armée française, le Niger accueille également des troupes allemandes et américaines sur son sol dans le cadre d’opérations antiterroristes. La junte au pouvoir remet en cause ces coopérations militaires et semble vouloir se rapprocher de la Russie, sur le modèle malien. Un scénario inquiétant pour les Occidentaux.
Paris craint désormais un scénario à la malienne, les juntes au pouvoir à Bamako depuis 2020 s’étant rapprochées de Moscou et ayant contraint la France à quitter le Mali. L’enjeu antiterroriste au Sahel est donc capital pour l’Élysée, qui ne peut se permettre de perdre un autre allié dans la région.
La prise de pouvoir des militaires putschistes nigériens risque de compliquer la lutte contre les groupes jihadistes liés à Al-Qaida et à l’État Islamique, très actifs dans cette zone sahélienne. Le Niger apparaissait jusqu’à présent comme un rempart face à cette menace.
Le Burkina Faso seul à soutenir les putschistes
Le Burkina Faso, dirigé par une junte issue d’un précédent coup d’État, est le seul pays de la région à ne pas avoir condamné cette tentative de putsch au Niger. Le gouvernement burkinabé a même souhaité « une coopération plus étroite » avec la junte nigérienne.
Cette position isolée illustre les nouvelles lignes de fracture géopolitiques dans la zone sahélienne. D’un côté, les pays dirigés par des militaires putschistes et en rupture avec l’Occident comme le Mali, le Burkina Faso et désormais le Niger. De l’autre, les États attachés à l’ordre constitutionnel et à leurs alliances traditionnelles comme le Sénégal ou la Côte d’Ivoire.
Conclusion
Ce coup d’État au Niger, le troisième en deux ans au Sahel, prouve la fragilité persistante des processus démocratiques dans la région. Malgré la condamnation unanime de la communauté internationale, il apparaît difficile d’inverser la spirale putschiste à l’oeuvre depuis 2020. L’enjeu sécuritaire face à la menace jihadiste et aux tensions communautaires semble l’emporter sur les avancées démocratiques réalisées depuis les indépendances.
Les prochains mois diront si le Niger saura finalement résister à ce recul démocratique, ou s’enfoncer comme le Mali et le Burkina Faso dans l’instabilité politique. La mobilisation citoyenne et le respect de l’ordre constitutionnel par les militaires seront déterminants pour l’avenir de ce pays, situé au carrefour de multiples crises régionales.