Paradis fiscaux : La France adopte le plan de l’impôt mondial à 15 % dans son projet de loi de Finances pour 2024

Un changement de stratégie pour lutter contre les paradis fiscaux

Alors que l’entrée en vigueur de l’impôt minimum mondial approche à grands pas, la France a décidé de transposer la directive européenne sur la taxation des multinationales à 15 % directement dans son projet de loi de Finances pour 2024. Cette décision marque un changement de stratégie de la part du gouvernement français, qui préférait initialement présenter un projet de loi spécifique. Cependant, après les débats houleux autour de la réforme des retraites, le gouvernement a choisi de se concentrer sur des sujets consensuels et des textes législatifs plus concis. L’intégration de l’impôt mondial dans le projet de loi de Finances permettra ainsi de garantir l’adhésion des grandes entreprises.

Un taux d’imposition effectif de 15 % critiqué

Le niveau du taux d’imposition effectif de 15 % est l’élément clé du dispositif de l’impôt minimum mondial. Cependant, certains estiment que ce taux est trop faible, notamment en France où le taux d’imposition nominal des sociétés est de 25 %. Cette différence donne l’impression que la réforme n’est pas aussi révolutionnaire qu’annoncée. Néanmoins, il est important de souligner que l’impôt minimum mondial concerne les profits réalisés à l’étranger, qui sont actuellement très faiblement taxés, et ne s’applique pas aux profits domestiques. Pascal Saint-Amans, architecte de la réforme de l’OCDE, a tenu à clarifier ce point dans un livre récent.

Un projet de loi intégré au processus législatif pour éviter les débats houleux

En intégrant l’impôt mondial dans le projet de loi de Finances, le gouvernement français souhaite éviter un débat houleux sur un projet de loi ad hoc. Avec l’utilisation de l’article 49-3, les oppositions auront peu de marges de manœuvre pour modifier le taux d’impôt minimum de 15 %. Cette approche est perçue comme favorable aux entreprises, qui craignaient que le taux ne soit jugé insuffisant par certains parlementaires. Ce choix législatif permettra ainsi de garantir la stabilité et la mise en œuvre effective de l’impôt minimum mondial.

Un report de l’examen du texte pour finaliser les détails

Le report de l’examen du texte à l’automne offre également du temps supplémentaire à l’OCDE pour finaliser les détails concernant les déclarations fiscales des multinationales. Ce sujet est particulièrement sensible et de nombreuses entreprises françaises ont demandé des garanties supplémentaires. En juillet, l’OCDE devrait présenter les règles déclaratives, ce qui permettra à l’administration française d’affiner les détails avant de soumettre le projet de loi de Finances au Conseil d’État. Ainsi, la France pourra harmoniser son dispositif avec celui des autres pays membres.

Des recettes supplémentaires estimées à 5 milliards d’euros par an

En adoptant l’impôt minimum mondial, la France espère générer des recettes supplémentaires. Selon le Conseil des prélèvements obligatoires et le Conseil d’analyse économique, ces recettes pourraient atteindre environ 5 milliards d’euros par an. Cette mesure représente un temps fort de la loi de Finances et marque la fin de la concurrence fiscale entre les États. Les entreprises devront effectuer leur première déclaration d’impôt au titre de l’exercice 2024, entre la fin 2025 et le début 2026.

Comment fonctionnera l’impôt mondial ?

Le mécanisme de l’impôt minimum mondial a pour objectif de collecter les recettes fiscales manquantes dues à la pratique du dumping fiscal par certains États. Par exemple, une multinationale française dont la filiale ne paie que 2 % de taux effectif dans un pays étranger qualifié de « paradis fiscal » devra payer les 13 % restants (correspondant à l’écart par rapport au taux mondial de 15 %) aux autorités fiscales françaises. Cette mesure, acceptée par plus de 130 pays en octobre 2021, constitue le Pilier 2 de la réforme de la fiscalité internationale portée par l’OCDE. En plus de mettre fin à la concurrence fiscale entre les pays, cette réforme vise également à mieux partager les profits générés par les 100 plus grandes multinationales. En somme, elle représente un pas important vers la fin des paradis fiscaux et la création d’une harmonie fiscale entre les nations.

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