L’Alliance Européenne-Chinoise pour l’Électrification Automobile

Les Constructeurs Européens S’allient avec leurs Homologues Chinois dans la Course à l’Électrification

Le secteur automobile a connu des bouleversements majeurs au cours des dernières décennies, et l’un des changements les plus significatifs concerne le passage à la mobilité électrique. Alors que les constructeurs européens ont longtemps dominé l’industrie automobile, la Chine a fait une entrée remarquée sur la scène mondiale de l’électrification automobile. Pour rester compétitifs et ne pas se faire distancer, de nombreux constructeurs européens ont choisi de collaborer avec leurs homologues chinois. Dans cet article, nous explorerons cette tendance croissante et les avantages qu’elle offre, tout en examinant les enjeux géopolitiques potentiels à long terme.

Une Évolution Stratégique Inattendue

Il fut un temps où les constructeurs automobiles européens se sont aventurés en Chine pour exploiter le potentiel du marché chinois et les coûts de main-d’œuvre avantageux. La Chine, avec sa population de plus de 1,4 milliard d’habitants, représentait une opportunité lucrative pour les groupes automobiles européens. Toutefois, les autorités chinoises ont posé leurs conditions, exigeant des partenariats entre les constructeurs européens et chinois pour transférer des connaissances technologiques sur les moteurs thermiques.

Après la pandémie de Covid-19, la Chine a pris une avance considérable dans le domaine des véhicules électriques, devenant un acteur clé sur la scène internationale. Les constructeurs européens ont alors pris conscience de l’importance de collaborer avec les leaders chinois de l’électrification pour acquérir des compétences essentielles. C’est ainsi que le retournement de l’histoire s’est produit, avec les constructeurs européens cherchant désormais des partenariats avec leurs homologues chinois.

Stellantis et Leapmotor : Un Accord Mutuellement Avantageux

En octobre, Stellantis, le groupe franco-italo-américain, a annoncé un partenariat surprenant avec Leapmotor, un constructeur chinois qui opère sur le marché automobile depuis huit ans. Carlos Tavares, le dirigeant de Stellantis, a justifié cette collaboration en affirmant qu’il valait mieux « bénéficier de l’offensive chinoise » dans le domaine électrique que d’en être une victime. Dans le cadre de cet accord, Stellantis détient désormais 20 % de Leapmotor et a créé une co-entreprise chargée de distribuer les véhicules du constructeur chinois en dehors de l’Europe.

Cette collaboration permet à Stellantis de tirer parti de l’expertise de Leapmotor dans la production de voitures électriques abordables. En effet, Leapmotor commercialise actuellement une citadine électrique à un prix attractif de 26 000 euros. Carlos Tavares a souligné à plusieurs reprises la nécessité de produire des véhicules électriques abordables en Europe pour encourager la transition vers la mobilité électrique.

Selon les analystes, cet accord contribue à réduire les risques financiers pour les constructeurs automobiles européens, ce qui a été bien accueilli par l’industrie. Volkswagen a également annoncé un partenariat avec Xpeng, un autre constructeur chinois, dans le but de développer des modèles haut de gamme sur le marché chinois, où il perdait du terrain.

Optimisation de la Production

Ces partenariats ne permettent pas seulement de renforcer les segments d’activité où les constructeurs européens sont moins compétitifs, mais ils contribuent également à réduire les coûts de production. Thomas Weber, directeur associé au BCG et expert du secteur automobile, explique : « Il faut énormément d’investissements pour mettre en place une nouvelle plateforme de production. Les co-entreprises permettent d’amortir les coûts. Il est souvent bénéfique de s’associer dès le lancement, car les constructeurs européens ont beaucoup à apprendre et peuvent capitaliser sur l’opportunité. »

Cependant, la question de la localisation des lignes de production reste cruciale. L’Union européenne a récemment ouvert une enquête sur les subventions accordées par la Chine à son industrie automobile, et des sanctions éventuelles sur les importations de véhicules chinois sont envisagées. En France, à partir de janvier 2024, le futur bonus ne sera accordé qu’aux voitures fabriquées en Europe, ce qui réduit les écarts de prix à l’achat.

Les Risques Géopolitiques à Long Terme

Malgré les avantages immédiats de ces partenariats, ils soulèvent également des préoccupations géopolitiques pour l’avenir. En 2020, les usines chinoises ont priorisé la satisfaction des constructeurs automobiles locaux en raison de la pénurie de semi-conducteurs, ce qui a entraîné des retards pour les constructeurs européens. Les constructeurs européens qui ont établi des co-entreprises estiment que collaborer avec la Chine permet de sécuriser les approvisionnements et de réduire l’impact potentiel de tensions futures.

Il est important de noter que jusqu’à présent, ces associations n’ont eu lieu qu’avec des constructeurs chinois de moindre envergure, tandis que les géants du marché chinois comme BYD et Nio n’ont pas encore manifesté d’intérêt pour de tels partenariats, préférant garder leur avance technologique. Certains constructeurs européens ont choisi d’explorer des collaborations spécifiques, telles que l’initiative de Mercedes et Geely pour développer la Smart électrique. D’autres, comme Renault, ont préféré maintenir leur partenariat avec Geely dans le domaine des moteurs thermiques, tout en envisageant une éventuelle collaboration élargie dans le domaine de l’électrification. Par exemple, l’usine du groupe Renault en Corée du Sud, détenue à hauteur de 34 % par Geely, se consacrera à la production de voitures électriques pour Polestar, un constructeur chinois, à partir de 2025.

Conclusion

L’alliance entre les constructeurs européens et chinois dans la course à l’électrification automobile est un développement majeur de l’industrie. Ces partenariats offrent des avantages économiques et technologiques indéniables, tout en contribuant à la transition vers une mobilité plus durable. Cependant, ils ne sont pas exempts de risques géopolitiques à long terme, et il sera crucial de surveiller de près l’évolution de ces collaborations dans les années à venir. En fin de compte, cette alliance pourrait façonner l’avenir de l’industrie automobile mondiale.

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